samedi 4 avril 2009

Quand l'art part en vrille!

« -Au début j’ai failli vomir et puis après ça m’a plu.
-ça ne se voit pas tout de suite le talent, Albert….. » in « Musée haut musée bas », Jean-Michel Rives, Actes sud-papiers, 2004

J’avais entendu de bons échos de la dernière pièce de Jean-Michel Rives « Musée haut musée bas » tant dans les médias que dans mon entourage. N’ayant pu m’y rendre, je me suis rabattue sur la pièce-papier afin d’en prendre connaissance.

Il s’agit d’un itinéraire original au sein d’un musée d’art moderne. L’auteur nous entraîne dans une ballade surréaliste et absurde avec un style qui n’est pas sans me rappeler Queneau ou Devos. Les scènes, les salles, les personnages s’y croisent et s’y succèdent dans un rythme soutenu. Il y a une mise en perspective de l’art contemporain, de sa production et de son approche critique. Tout peut-il être art ? Peut-on tout faire au nom de l’art ? Est-t-on dans une société du tout se vaut en art ?

Loin d’être un pamphlet cynique ou un discours philosophique, c’est une pièce excessivement drôle et décalée. Les personnages sont des caricatures, leurs propos hilarants mais le questionnement que soulèvent cette ironie et ce comique est pertinent. On pénètre dans l’univers du cahot artistique et de l’embrouillamini de la pensée.
Les discours prennent plusieurs formes : dialogues, discussions de groupes, discussions familiales, rencontres……

On y côtoie toutes sortes de gens et d’évènements plus extravagants les uns que les autres : un parking sous-terrain où les visiteurs se perdent, des performances hurluberlues, un africain clandestins caché dans des cartons de sculptures, une exposition de photos de pénis…..
Jeux de mots, clins d’œil et double sens règnent dans cet univers langagier. Il y a une quête originale du sens, un détournement du réel, de la logique.
Cette pièce tourne en dérision le culturellement correct et le bon ton. Il y a des dialogues savoureux comme celui entre Sulki et Sulku dont je vous livre un extrait : « Sulki. J’ai honte qu’on ait parlé de la télévision, Sulku ! »
-« Moi aussi……On se rattrape ? »
-« Tout de suite. Tu me fais une sculpture, Sulku ? »
-« Et toi une peinture, Sulki ? »
Ils se précipitent dans des poses ».

Les critiques, le public aspirent à intellectualiser leurs sentiments, leurs émotions ou l’absence de ces dernières et cela donne des propos délicieusement drôles .l’illustre bien les mots des visiteurs lors de l’exposition de photos de pénis (qui n’est pas sans nous rappeler celle de Benetton/Toscanni) :

« Hervé.Non, non je sais ce que tu vas me dire Thérèse, si je suis moi-même très ému par ta propre émotion c’est qu’en réalité ce sont à travers toi les trois cent cinquante photos de bites qui m’atteignent et donc que l’exposition est forte(….) »
Sylvianne : « Et l’immobilité Bruno, c’est ça qui est fascinant, l’immobilité de toutes ces queues !Ce côté mat, pylones. Et ça c’est la photo…La photo, c’est l’objet pétrifié, immobile. »
Simone : « La subversion d’accord, mais dans ce cas-là moi j’appelle l’exposition Zob ! »
Sam : « Tu vas trop loin Simone ! »
Julien « Non mais appeler ça Effondrement du réel, c’est un peu énorme franchement. »
Galienne « Pourquoi ? C’est précisément l’accumulation d’un même motif qui crée l’irréalité…. »
Sam « Et massacre le réel, Simone. »



La lecture de cette pièce m’a fait sourire et m’a rappeler quelques expos parisiennes et certains commentaires ! Si vous êtes parmi les chanceux qui ont vu cette pièce, je serais ravie de savoir ce que vous en avez pensé.

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